Mise à jour septembre 2025 a
Contexte et intention de cet article
En réaction au chaos, certaines personnes croient que revenir aux #morales d’il y a 70 ans (et davantage en arrière) nous sortiraient du pétrin. Je tente ici de montrer à quel point c’est une théorie hasardeuse.
Résumé & plan de la page
Le faux bon modèle : il génère de la frustration existentielle et des discriminations.
La #frustration : une pression psychique qui peut libérer une énergie guerrière, d’autant plus qu’elle est habituellement muselée par un carcan de fausse paix.
La #guerre exutoire : le guerre est secrètement désirée pour sortir d’une société civile d’interdits multiples.
L’addiction consumériste : nos rôles sociétaux nous incitent à surconsommer. La consommation nous satisfait suffisamment pour qu’on veuille maintenir ce mode de vie, mais elle nous éloigne d’une réalisation authentique et naturelle.
L’austérité : les politiques qui visent à priver ne règlent aucun problème à sa racine. Elles se font passer pour une forme d’ascétisme, mais elles sont un nouvel abus de quelques ultra privilégiés.
Le marketing politique est un leurre qui sert à boucler une domination cyclique de la population :
frustration > guerre > fausse paix consumériste > retour aux fausses bonnes morales > frustration > etc.
Discerner sans dénigrer
La faux bon modèle
Une éducation qui enseigne des « bons modes de vie », qualifie implicitement les autres modes de « moins bons ».
Lorsque l’on se laisse obséder par des concepts de bons et de mauvais modèles de vie, on fait un pas vers la pente glissante de la violence contre autrui (discriminations, harcèlement, interpellations abusives…), ou de la violence retournée contre soi (« je ne vaux rien, je suis nul.le…).
Prenons un exemple en lien avec les clichés qui séparent les hommes et les femmes.
Ce n’est pas préjudiciable, pour un.e adolescent.e, de se dire qu’il est un homme masculin ou qu’elle est une femme féminine, si ça lui plaît de se définir ainsi, si cette identification à une figure archétypale peut l’amener à prendre soin de son corps, et l’aide à s’intégrer dans certains groupes.
Mais c’est préjudiciable si ça l’amène à être violent.e, agressif.ve, homophobe, sexiste, et en premier lieu si ça l’amène à haïr en iel-même tout ce qui n’est pas conforme au modèle (fille poilue, garçon qui n’aime pas la musculation, tout trait de personnalité ou un physique hors normes).
- Savons-nous apprécier des personnes, ou des styles de vie, sans dénigrer les autres, et tout en suivant notre propre boussole intérieure ?
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Renier notre propre sensibilité, notre force, ou toute part de notre existence, est un chemin vers la frustration.
En manque d’amour et de tendresse pour nous-mêmes, nous risquons notamment un sentiment de dépendance affective (l’autre nous apparaissant comme notre source d’amour).
manque d’amour pour le vrai soi > frustration > amour-dépendance > fragilisation du vrai soi > rupture du couple vécue comme un tsunami > dépression > reconstruction de l’estime de soi…
La frustration
Les frustrations, les souvenirs pesants, et trop d’anxiété à propos de notre futur, peuvent créer une pression psychique en nous.
La pression est une force motrice lorsqu’elle est canalisée, mais un risque explosif lorsqu’elle s’évacue brutalement (après avoir été trop contenue).
A l’échelle d’un pays, une pression peut s’évacuer en guerre civile.
A l’échelle internationale, en guerre ou en attentats.
A l’échelle d’une personne, en problèmes de santé (dont le burn‑out, l’apathie, des maladies diverses…), en violence (contre autrui, ou retournée contre soi).
Les pulsions (créatives, sexuelles…), les motivations, ne peuvent probablement pas être réprimées indéfiniment.
La violence (et la colère) étant elles aussi prohibées par certaines morales, une personne qui à la fois s’interdirait d’être librement créative, et d’exprimer la colère générée par la frustration conséquente à cet interdit, serait dans un carcan moral à fort risque explosif.
Les carcans (de fausse paix) sont comme un élastique tendu −qui peut lâcher.
La guerre exutoire
En temps prétendument de paix (en temps de paix apparente mais sans conscience profondément fraternelle), il demeure des compétitions, une guerre économique et divers conflits larvés.
Dans ce contexte devenu banal, certaines personnes (notamment celles qui ne se sont pas encombrées d’un fardeau moral austère) semblent jouir davantage. Cela peut susciter une forme de jalousie de leur apparente liberté.
Quelles morales frustrent ?
Notamment celles qui désinforment au sujet :
° de la sexualité (prétendant qu’elle serait sale et honteuse),
° de la possibilité d’entendre l’intuition (prétendant que sans hiérarchie religieuse, on se damnerait si on écoutait nous-mêmes les messages de notre âme),
…
Cela ne veut pas dire que la sexualité doit être vécue n’importe comment, ni que l’on doit se prêter à n’importe quel channeling… cela veut juste dire que nous pouvons apprendre à vivre autrement que dans l’obscurantisme.
Je travaille en milieu scolaire, et constate que l’obscurantisme n’a pas disparu, même en France, même en 2025.
Même si consciemment quelqu’un s’inflige volontairement une morale qui le frustre, il peut inconsciemment souhaiter la fin de cette morale afin de jouir à nouveau de la vie.
Je fais l’hypothèse que la frustration peut amener des gens à souhaiter, inconsciemment,
qu’une guerre advienne.
Pourquoi cela ?
Parce que la guerre constitue un espace‑temps immoral qui affecte tout le monde, y compris les gens affublés d’une morale :
tout le monde se retrouve à la même enseigne, aux prises avec la vie, avec des choix urgent et même des injonctions impossibles, mais avec un contexte, un prétexte plutôt : la survie.
Si la survie est légitime, il est plus facile de s’autoriser à lâcher une morale routinière pesante.
Cela ne veut pas dire que toutes les morales sont désagréables à vivre au quotidien.
Cela veut dire que si l’on n’a pas respecté un équilibre en nous-mêmes, pour vivre suffisamment libre au regard de nos besoins évolutifs, et de nos envies légitimes de bonheur dans la simplicité, alors malgré nos couches de déni, nous pouvons inconsciemment œuvrer pour qu’advienne une situation nous libérant malgré nous. Cette situation est notamment la guerre, alias le massacre du monde connu.
En outre, lors des guerres, m’a‑t‑on relaté, en l’absence de savoir s’autogérer, et en l’absence d’autorité saine, certains accèdent à de sombres pulsions : tuer, piller, abuser, torturer…
Autrement dit, dans le contexte de guerre, les sensations interdites se retrouvent plus facilement réalisables.
Notamment, le besoin de contact humain jadis dénigré (ou refoulé) revient sous une forme brutale.
Plus généralement, les émotions que l’on s’interdit d’éprouver se transforment souvent en quelque chose de plus violent. (Même en temps de paix).
Par exemple, en empêchant un humain de pleurer et d’exprimer sa tristesse, on le pousse à bout : il risque de transmuter sa tristesse en rage.
Ou bien, dans une cour de récréation, à force de traiter de PD tout garçon non conforme à un stéréotype de virilité, on dissuade les garçons d’exprimer leur tendresse spontanée, souvent au point que certains n’osent se toucher qu’en se bagarrant.
A contrario, sans pression sexiste homophobe quotidienne, les garçons tantôt se bagarreraient, tantôt seraient tendres entre eux (sans parler de sexualité, juste de manière de se comporter en société). Il n’y aurait pas cette chape de plomb sur la tendresse naturelle que peut ressentir tout être, peu importe son sexe.
- Les divertissements violents, en temps de fausse paix et de vrai consumérisme, permettent aussi une sorte de défoulement ; mais libèrent-ils ou entretiennent-ils les pulsions agressives ?
L’addiction consumériste
Les personnages dont nous jouons les rôles(1), nous amènent à croire qu’il faudrait consommer pour exister. La publicité vient en renfort :
des appareils ménagers pour le rôle de citadin moderne,
des voitures puissantes pour le rôle de prédateur kilométrique,
des vêtements de star pour le rôle d’ado branché (ayant envie et peur de se fondre dans le moule conformiste)…
(1) un article en préparation pour expliciter ces rôles que l’on joue tous les jours, sans forcément nous en rendre compte : rôles convenu tels le métier, rôle mimés instinctivement…
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Jouer nos rôles, y compris en achetant tout ce qu’il faut pour, ne nous procure qu’un plaisir superficiel.
Être un employé/mari/élève/… accompli ne rend pas nécessairement empathiques, ni cocréateur d’une société fraternelle et soutenable.
Pourquoi ?
Parce que d’une part, se surinvestir dans nos rôles en société peut nous couper de nous-mêmes, donc de notre empathie et de notre objectif de vivre en paix ;
d’autre part parce que la majorité de nos métiers et rôles sont écrits pour une société guerrière, dominatrice, non pacifiste.
Par exemple, dans beaucoup de métier, nous sommes pressurisés par un impératif de productivité. Cet impératif n’existe que pour résister à une guerre économique. Si nous travaillions seulement pour le bien être de tous, ce serait plus tranquille.
Bon nombre de consommateurs comblés (ayant logement, travail, épargne, loisir, sport, affection, sexe, ami.e.s, distractions, moyens de transport, jardin…) surconsomment égoïstement et en veulent « toujours plus » !
Si l’on est frustré par un mode de vie rigide rempli d’interdits, ou si l’on est frustré par une vie superficielle remplie d’autorisations de consommer des produits fondamentalement à côté de la plaque, on tourne en rond dans un schéma qui ne satisfait pas notre nature.
Si l’on se sépare de notre nature au profit du rêve d’une apparente réussite consumériste, dévote, professionnelle, séductrice…, on se sépare du discernement (de « l’ancrage ») qui nous permettrait de considérer le monde marchand, le monde des rôles sociétaux, pour ce qu’ils sont :
des #systèmes qui préservent leur existence propre plutôt que d’assurer notre épanouissement (individuel et collectif).
Le théâtre sociétal s’auto-alimente en proposant quelque chose de suffisamment attractif pour être désiré, mais de suffisamment inadéquat pour laisser persister la croyance qu’un nouveau service, ou qu’un nouveau produit, nous procureraient le bonheur, la santé, … donc nous incite à ne rien changer.
Par exemple, depuis 35 ans que je fais de la photo, tous mes appareils ont été à la fois géniaux, et à la fois toujours ratés en ergonomie afin, simple hypothèse, de maintenir le désir d’en acquérir un nouveau dès que possible.
La part jouissive de nos produits artificiels permet de supporter la frustration existentielle, mais pas de la transcender (c’est–dire pas de s’en émanciper).
Le consumérisme matérialiste grossit grâce aux frustrations que nous ne gérons pas : celles pour lesquelles nous sollicitons un service miracle à acquérir.
La notion de « toujours plus » a des conséquences directes : pollution massive, risques industriels, promiscuité urbaine, étalement pavillonnaire(2), déforestation, disparition d’espèces, guerres, impact climatique, capitalisme…
(2) L’étalement pavillonnaire, avec le niveau de conscience environnementale actuel, a un impact négatif : recul des zones sauvages, routes et surfaces bétonnées, herbe tondue mécaniquement, biodiversité faible, absence d’outils partagés tels que piscine, four, machine à laver, outils…
La concentration urbaine apparaît alors comme une solution préférable à cet étalement, mais elle n’est pas idéale : l’humain a besoin d’être relié à la nature −pas de la dominer, mais d’être en synergie avec.
Le plaisir inadéquat ne solutionne rien : manger, avoir une relation sexuelle, acheter… peuvent répondre à un besoin et apporter une satisfaction,
mais peuvent aussi être réitérés juste pour masquer une frustration, et remettre à plus tard d’embrasser nos défis existentiels.
Pour désirer sortir du système économique et politique actuel, basé sur l’accaparement (le détroussement de la nature et de la majorité des habitant.e.s),
comprenons qu’une telle organisation ne répond pas à notre besoin essentiel de réalisation (de soi).
Le matérialisme est basé sur une quête de remplissage (avoir, plutôt qu’être démuni), mais il est spirituellement inconsistant, au contraire du « vide » qui nous régénère, lors de ballades dans des forêts et clairières et dans divers espaces naturels harmonieux.
L’austérité politique
Une politique d’ #austérité économique consiste en une réduction des budgets sur les postes fondamentaux non directement productifs : qualité de l’éducation, de la santé, de la démocratie, de la culture…
Elle ne s’attaque pas aux privilèges, ni à l’ignorance, ni ne propose de sortir de l’accaparement outrancier par certains :
elle ne résout aucun problème de fond ;
elle prive les moins riches ;
elle est maintient les jeux de domination (d’une caste dominante envers le reste du peuple, ou de n’importe quel individu envers un autre).
Elle est, grosso modo, souvent le programme de la droite, de l’extrême droite, et du centre, des lors qu’ils ont dilapidé toutes les ressources publiques en cadeaux aux plus riches.
Cela ne veut pas dire que la gauche fait nécessairement bien.
Cela ne veut pas dire que le populisme (qui promet tout et n’importe quoi) est une bonne réponse.
Cela veut dire que c’est abject de serrer la ceinture des plus pauvres, mais pas celle des plus riches.
Cela veut dire que beaucoup mentent en prétendant être du côté de ceux qui se lèvent tôt, alors qu’ils sont du côté des rentiers qui ne contribuent pas au bien être collectif.
NB. on peut être rentier, ou allocataire RSA, et œuvrer pour le bien être collectif. Mais les politiques d’austérité (connues jusqu’ici) œuvrent à maintenir des privilèges stériles.
Ce qui précède n’est pas à confondre avec différentes vertus :
L’auto‑discipline (voire l’ascétisme) est un moyen de parvenir à un but (spirituel, sportif, ou autre.
Elle est parfois vécue avec satisfaction, pour cheminer vers le but désiré
Une politique d’austérité est différente : elle est une privation, imposée au plus grand nombre, sous menace d’un châtiment ou d’une pénurie, augmentant la violence de la société, et concentrant du pouvoir dans les mains de quelques contremaîtres chargés de réprimer les plus pauvres et les plus rebelles.
- Avant de nous priver, ou de nous gaver, demandons-nous et prenons le temps de ressentir profondément :
- est‑ce par amour ou désamour de nous-mêmes (ou de la vie) ?
De quoi avons-nous réellement besoin maintenant ?

Le marketing politique
Un soit-disant retour aux sources
#sauveur
Bien des morales prétendent nous sauver des #dérives du monde moderne, en proposant un soit-disant retour aux sources, sans consumérisme, sans plaisir sexuel.
Outre que le passé est présenté de manière très romancée −donc il n’y a pas vérité−,
quand bien même un vrai retour à d’authentiques morales d’autrefois serait proposé, il reste deux problèmes :
1. si les morales de jadis ont périclité, c’est qu’elles n’ont pas su satisfaire (puisqu’on les a délaissées) ;
2. si elles ont précédé un monde prétendu fou, elles en sont possiblement l’une des racines.
Des siècles de brimades (notamment psychiques) pourraient-ils expliquer en partie le succès du dogme matérialiste / scientiste actuel (lequel recherche une émancipation du passé) ?
Les morales frustrantes, parce qu’elles interdisent nos mœurs naturels (aimer qui on veut, par exemple) sont l’opposé du naturel (contrairement à ce qu’elles prétendent lorsqu’elle jugent contre-nature ce qui s’oppose à elles).
En outre, les morales qui tendent à priver du sentiment d’être naturellement (heureux), et qui incitent à acquérir une attitude (prétendument) salvatrice, font place au concept d’acquisition (de la bonne attitude).
Le désir d’acquérir est précisément l’un des leviers de la marchandisation du monde.

Ce n’est pas de faux-sauveteurs dont nous avons besoin, mais …
de quoi, selon toi ?